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Les élections européennes ont reconfirmé l'existence d'un glissement idéologique vers la droite au sein de l'électorat espagnol, le Parti populaire (PP) de centre-droit obtenant 22 sièges sur les 61 attribués au niveau national, suivi de près par le Parti socialiste (PSOE), qui a obtenu 20 sièges.

 À première vue, la faible marge de voix entre le PP et le PSOE peut sembler insignifiante. Pourtant, dans le contexte des élections régionales et nationales de 2023, les élections européennes représentent la troisième occasion où le parti d'opposition de droite a obtenu le meilleur résultat électoral, bien que l'Espagne soit gouvernée par le parti socialiste. Dans l'ensemble, ces élections ont réaffirmé la polarisation idéologique familière dans le pays, qui persiste depuis l'arrivée de la démocratie moderne en 1978. Malgré l'arrivée de nouveaux partis d'extrême gauche et d'extrême droite au cours de la dernière décennie, tels que VOX, Podemos et, plus récemment, Sumar, ils n'ont fait que cimenter, voire accentuer, la polarisation entre la gauche et la droite. Au niveau législatif, la conséquence est que les politiques sont plus souvent jugées par le public espagnol en fonction de leur affiliation politique que de leur contenu réel.

 L'amnistie catalane : un catalyseur de polarisation ?

 La loi d'amnistie catalane est l'exemple le plus récent et le plus controversé d'un jugement politique motivé par l'esprit de parti. Cette loi, qui est entrée en vigueur le 11 juin, vise à amnistier les personnes qui ont participé au référendum illégal de 2017 ou qui ont été accusées de délits liés au "processus" d'indépendance depuis 2011, allant d'amendes liées à des violations de la sécurité civile à des détournements de fonds et à un terrorisme de "faible intensité".

 Pendant des années, l'inconstitutionnalité d'une amnistie catalane a été un point de consensus unique entre les partis de gauche et de droite, jusqu'aux élections générales de 2023. Ni le PSOE ni le PP n'ont pu obtenir la majorité absolue, et le PSOE a conclu un pacte avec le parti indépendantiste catalan Ensemble pour la Catalogne (Junts), qui a offert ses 7 sièges au parlement en échange du projet de loi d'amnistie. Depuis lors, le PSOE a défendu l'amnistie comme un élément essentiel de la normalisation des relations entre la Catalogne et le reste de l'Espagne, tandis que l'opposition s'y est fermement opposée. Ce qui est peut-être plus intrigant, c'est qu'en général, les deux groupes d'électeurs ont pleinement adopté et défendu les positions de leurs partis respectifs.

 Analyse du vote espagnol sur l'UE : Enjeux nationaux ou européens ?

 Cela soulève la question suivante : les résultats des élections européennes en Espagne reflètent-ils les opinions des Espagnols sur les questions européennes ou les questions nationales, telles que l'amnistie, ont-elles influencé les électeurs ? Dans le premier cas, l'Espagne s'alignerait sur le glissement idéologique vers la droite observé dans toute l'Europe après le 9 juin. Toutefois, si le second scénario est l'explication la plus exacte, il est probable que les résultats reflètent la désapprobation collective à l'égard des positions politiques nationales du gouvernement espagnol.

 Pour répondre à cette question, il est tout d'abord important d'examiner le moment où la loi d'amnistie a été approuvée, puisqu'elle a été adoptée par le Congrès espagnol le 30 mai, ce qui l'a placée au centre des débats publics et médiatiques dans les jours précédant les élections. Bien qu'elle n'ait été officiellement publiée qu'au lendemain des élections européennes, le verdict public sur l'amnistie était déjà établi selon les lignes des partis politiques avant les élections.

 Deuxièmement, il est important de considérer la stratégie électorale du PP, qui a présenté l'ensemble de son programme électoral européen comme un appel au mécontentement des citoyens face à la manière dont le gouvernement actuel traite les questions nationales, en utilisant le slogan "votre vote est la réponse". Bien qu'il ne mentionne pas explicitement l'amnistie, le programme du PP évoque la nécessité de "rétablir l'égalité entre les Espagnols" et souligne que les "attaques contre la Constitution espagnole" constituent un problème à la fois européen et national. De plus, le PP a été le principal opposant à l'amnistie au cours de cette législature et a organisé plusieurs manifestations de masse contre la loi dans les mois précédant les élections du 9 juin. Il est donc raisonnable de penser que l'ancrage de l'amnistie en tant que question partisane a été renforcé par le parti de droite.

 D'autre part, les résultats des élections présentent des éléments supplémentaires qui suggèrent que l'amnistie n'a pas été un facteur de décision central pour les électeurs. Par exemple, la représentation électorale des partis d'extrême droite, VOX (9,6%) et "La fête est finie" (SALF) (4,6%), ce dernier faisant sa première apparition électorale, indique un sentiment de désaffection à l'égard du système bipartisan traditionnel. VOX, dans une tentative stratégique de détourner les électeurs de droite du PP, a axé sa campagne politique sur la révélation de la "collusion" cachée entre les partis PP et PSOE à Bruxelles, affirmant qu'ils votent de la même manière 89% du temps. De même, le leader du parti SALF a gagné en popularité grâce à son idéologie antipartiocratique et anticorruption, critiquant sans relâche le système politique traditionnel en Espagne.

Que l'amnistie catalane ait été ou non un facteur décisif dans la décision des Espagnols de pencher vers les partis de droite, il y a un signe clair que les élections européennes sont intentionnellement guidées par des questions essentiellement nationales plutôt que par des questions européennes. Si ce phénomène est inévitable et commun à toute l'Union, la question reste de savoir si ce sont les hommes politiques nationaux ou l'UE elle-même qui en tirent le plus grand profit.

Dualité européenne-nationale dans les affaires publiques

L'importance des questions nationales dans les élections européennes exige de plus en plus que les campagnes d'affaires publiques (AP) aient la capacité d'aborder les questions à la fois au niveau européen et au niveau national. Cela nécessite une connaissance approfondie du paysage politique des États membres, ainsi que la capacité de tirer parti des questions nationales importantes et de la dynamique des partis politiques dans des récits à l'échelle européenne. Cela ne signifie pas pour autant que les campagnes d'AP ne peuvent être que réactionnaires aux résultats des élections. Au contraire, cela montre que les élections européennes sont l'occasion de déterminer quel objectif, européen, national ou les deux, est le plus bénéfique pour les campagnes d'AP et de concevoir leurs stratégies en conséquence. 

María Morales Durán
Auteur :
Maria Morales
Durán
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